Résumé de la politique énergétique et climatique de la Suisse  

Assises européennes de la transition énergétique – 19ème édition
Genève, 30 janvier 2018
Planches de la présentation

(le texte prononcé fait foi)

Permettez-moi, en cinq minutes et quatre slides, de vous présenter la stratégie énergétique et climatique Suisse.

Dès 2008, la Suisse a commencé à mettre en œuvre une politique relativement ambitieuse de réduction des émissions de CO2 imputables aux combustibles fossiles, c’est-à-dire au chauffage des bâtiments, à l’industrie et à l’artisanat. But overall : -20% de réduction des émissions de gaz à effet de serre en comparaison de  1990 (en 2010, on était à 100% de 1990).

Les instruments :

  • Une taxe sur le CO2 sur les combustible, amenée progressivement à 85 la tonne. Deux tiers de cette somme est restituée aux entreprises. Un tiers sert à subventionner l’assainissement énergétique de l’enveloppe du bâtiment et des systèmes de chauffage. (Carburants pas concernés.
  • En parallèle, les cantons ont peu à peu durci leurs normes énergétiques pour les bâtiments neufs et les rénovations.
  • À la place de la taxe, un système similaire ETS européen a été mis en place pour l’industrie lourde, avec un dysfonctionnement également similaire. Et maintenant de manière tout aussi similaire, nous essayons de le durcir. Et d’y inclure l’aviation à l’occasion du couplage avec le système européen.
  • Pour les PME, il est possible de se faire exempter de la taxe sur les émissions de CO2 en contrepartie d’un engagement contractuel sur un plan mesure précises pour augmenter l’efficacité énergétique de l’entreprise.

Globalement, l’impact sur le bâtiment a été très important, pas seulement en raison des soutiens financiers, mais également en raison de toutes les projets d’information, de formation professionnelle et de sensibilisation.

Le résultat est visible sur ce graphique qui représente les émissions de CO2 imputable à l’énergie (le kérosène des vols internationaux, qui représentent entre-temps 5 millions de tonnes d’émissions, n’est pas pris en compte). Le constat est cinglant : dans les secteurs où une politique ambitieuse a été conduite, la baisse est très nette. C’est la courbe rouge des combustibles.

Emissions de CO2 d’origine énergétique en Suisse

(hors aviation internationale)

 

 

Source: https://www.bafu.admin.ch/bafu/fr/home/themes/climat/donnees-indicateurs-cartes/donnees/statistique-sur-le-co2.html

 

A contrario, l’évolution des émissions imputables aux carburants (bleu) reflète la faiblesse des mesures suisse et des mesures européennes en matière de mobilité.

Depuis 2007, la Suisse a mis en place un système d’encouragement de l’investissement dans la production – la récolte– d’électricité renouvelable. Il a suscité un grand engouement et a dû être renforcé. Il existe également des programmes d’encouragement de l’efficacité électrique.

Suite à la catastrophe de Fukushima, qui a rendu complètement impossible la construction de nouvelles centrales nucléaires, la Suisse a adopté une nouvelle stratégie énergétique globale. Celle-ci a été acceptée par 58 % des citoyennes et citoyens le 21 mai 2017, au terme de plus de six ans de travaux préparatoires gouvernementaux, puis parlementaires, et enfin d’une virulente campagne référendaire, l’extrême droite et une partie de la droite économique combattant le projet.

Déclenchée par les opposants, ce référendum a finalement permis une vaste campagne pédagogique sur les questions énergétiques auprès la population et à conférer à la nouvelle stratégie une légitimité très élevée. À relever un important renversement des alliances : les partisans de l’hydroélectricité ont accepté de s’allier avec les nouvelles énergies renouvelables et les milieux ruraux, traditionnellement conservateurs, y ont vu une chance pour les territoires.

S’agissant du type de discours pratiqué, je vous renvoie – de manière légèrement égocentrique mais s’agissant d’un politicien cela ne vous surprendra pas –  au cours vidéos en ligne sous www.roger-nordmann.ch/mooc.

Sur le fond, la nouvelle législation sur l’énergie comprend cinq axes

  1. Interdiction de la construction de nouvelles centrales nucléaires, mais sans de limite légale exploitation du parc atomique existant. Vu l’âge avancé de celui-ci en s’attend à ce que le premier tiers s’arrête aux alentours de 2020 le second tiers vers 2029 et le troisièmes en 2034. En réalité en raison des pannes à répétition, la production a déjà fortement décliné.

 

  1. Remplacement du nucléaire par une production électrique renouvelable additionnelle, dont la moitié photovoltaïque. Mais les mesures décidées ne permettent pour l’instant que de procéder à la moitié la substitution. En tenant compte de l’évolution technologique, un second pas devra suivre. Vu la difficulté des projets éoliens sur notre territoire exigu, on peut s’attendre à davantage photovoltaïque. La modernisation du parc hydro joue aussi un rôle important, même si actuellement les conditions de marché sont extrêmement difficiles.

 

  1. Le programme subventionnant de l’assainissement du bâtiment est renforcé et simplifié. Il est étendu aux bâtiments chauffés à l’électricité, car les pics de consommation hivernale génèrent de grosse émissions de CO2 (électricité charbonnière importée). Enfin les déductions pour mesures d’assainissement du bâtiment peuvent être étalées sur deux à trois exercices fiscaux, ce qui encourage les démarches d’assainissement des bâtiments plus ambitieuses et conçues globalement.

 

  1. La Suisse a repris dans sa législation les normes européennes de 95 g de CO2 au kilomètres pour les voitures et de 147 grammes pour les camionnettes, y compris leur non-respect de facto.

 

  1. De maigres mesures d’efficacité électrique ont été adoptées. Toutefois, l’on assiste depuis six ans à une très légère régression de la consommation d’électricité.

Voilà, en quelques mot, les grandes lignes de la stratégie énergétique nationale.

Actuellement, le Parlement a commencé ses délibérations pour la nouvelle politique climatique 2020-2030, c’est-à-dire l’application de l’Accord de Paris.

La clef du succès, c’est que l’efficacité de l’action publique tient à la conjonction de mesures qui interagissent entre elles pour produire une politique globale. Cependant, celle-ci ne peut véritablement se déployer que si le discours de la transition énergétique est clairement assumé, ce qui est désormais le cas.