2018

Rapport annuel 2018 de Roger Nordmann, conseiller national, PS VD.

 

Si l’année 2017 fut celle des grandes votations, l’année 2018 fut celle du service après-vente. Le rejet de la réforme fiscale des entreprises RIE III en février 2017 a certes permis d’éviter une réforme très injuste, mais il n’a pas résolu la question des régimes fiscaux de dumping pour les entreprises. Quant au regrettable rejet de la réforme de la prévoyance vieillesse en septembre 2017, il a laissé la Suisse avec l’entier de ses problèmes de financement du système de prévoyance sur les bras.

Après quelques travaux préparatoires du Conseil fédéral pour surmonter ces deux blocages, c’est le Conseil des États qui a trouvé une solution en couplant les deux projets de substitution, en donnant naissance à la réforme fiscale et financement de l’AVS (RFFA). Son volet fiscal limite la casse pour les caisses des collectivités publiques sans y parvenir complètement, vu que l’abandon du dumping ne saurait être sans conséquences financières. Pour garantir le traitement équitable des différentes couches de la société, il a été décidé de mettre sur pied un financement additionnel de l’AVS qui est une assurance sociale à fort effet redistributif. Ce fut le deuxième volet de la réforme.

Cette approche était tellement non conventionnelle qu’il a fallu de très longues discussions pour que le Groupe socialiste aux Chambres fédérales se rallie à ce projet à une très large majorité. Nous y avons consacré 7 heures de discussions au plénum, en plusieurs étapes. Il s’agit, me semble-t-il, du dossier le plus chronophage pour le Groupe depuis je suis au Parlement.

Le lendemain de l’acceptation du projet par le Conseil national, nous avons eu une Assemblée des délégué-e-s du PS Suisse très animée, lors de laquelle nous avons décidé, par 68 % de oui, de soutenir ce compromis. Le débat a été d’une qualité remarquable. Comme d’habitude, l’extrême-gauche a lancé un référendum et s’efforce donc pour la deuxième fois de suite de saborder le financement de l’AVS. Espérons qu’elle ne réussisse pas cette fois, après avoir livré les signatures qui ont permis à l’UDC et au PLR de torpiller la « Prévoyance 2020 ». Réponse au mois de mai 2019.

Présidence de la Commission de l’environnement de l’aménagement du territoire de l’énergie du Conseil national (CEATE-N)

Comme président de la CEATE-N, j’ai piloté le débat sur la loi sur le CO2 pendant près de 10 mois. En commission, nous sommes parvenus à améliorer légèrement le projet insatisfaisant présenté par le Conseil fédéral. Le rapport de force fut tel que la plupart des décisions ont été prises par 13 voix contre 12, souvent avec ma voix prépondérante. Dans le camp des ennemis du climat, il y avait l’UDC et le PLR. Ce dernier tenait un discours hypocrite. Mais comme on a pu le constater, c’est au plénum en décembre que les masques sont véritablement tombés. Grâce à leur majorité de 101 voix sur 200, le PLR et l’UDC sont parvenus grâce à plus de 30 votes gagnés à quelques voix d’écart, à vider la loi de sa substance. Conformément aux décisions prises, la Suisse aurait pu acheter toutes ses réductions de CO2 à l’étranger, sans faire d’effort sur son propre territoire. La tactique inadmissible du PLR était la suivante : faire recours à l’UDC pour éviscérer la loi et compter sur les voix socialistes pour faire accepter ensuite le projet lors du vote final. Face à un tel sabotage, nous avons refusé de cautionner l’exercice. Comme l’UDC a voté contre le projet de loi parce qu’elle nie le problème du réchauffement climatique, il a échoué lors du vote final au Conseil national. Cela une bonne chose, car les travaux pourront reprendre plus sereinement au Conseil des Etats.

Cet épisode illustre parfaitement la nécessité de redresser les rapports de force au Conseil national lors des élections fédérales de 2019.

Président du groupe parlementaire

Comme d’habitude, mon rôle de coach, arbitre, masseur, infirmier et policier m’a passablement occupé. Pour arriver à une distribution plus rationnelle les sièges de commission et diminuer les conflits au sein du groupe lorsqu’un siège est à repourvoir, nous avons réformé le système d’attribution des sièges de commission. Désormais, la décision est confiée à la présidence et le plénum n’a plus qu’un droit de veto à la majorité qualifiée. Si cette dernière est atteinte, la décision est alors renvoyée au comité du groupe. En plus, des principes d’équité ont été formalisés dans le règlement du groupe.

Election au Conseil fédéral

La double démission de Doris Leuthard et de Johan Schneider-Ammann a provoqué beaucoup de turbulences dans la course au remplacement mais résultat est précisément à la hauteur des turbulences : depuis le 1er janvier 2019, il y a de nouveau trois femmes au sein du Conseil fédéral et nous en sommes ravis.

Accord-cadre avec l’Europe

Après le premier semestre rempli d’espoir quant à la perspective de l’aboutissement des négociations de l’accord-cadre avec l’UE, la situation s’est rapidement détérioré. Le Parti socialiste a tenté, sans succès, de faire comprendre au Département fédéral des affaires étrangères qu’un accord-cadre qui menacerait les mesures d’accompagnement aurait pour conséquence un blocage du projet. Nonobstant les avertissements des chef-fe-s de tous les partis gouvernementaux, le ministre des affaires étrangères a voulu conclure cet accord, conduisant à son blocage total début 2019. Ignazio Cassis a pris le risque de casser la coalition qui, historiquement, a permis l’intégration européenne de la Suisse : l’alliance entre la gauche et les syndicats qui exigeaient des garanties quant au marché travail et le centre-droit qui exigeait l’ouverture économique. A l’heure d’écrire ces lignes, il n’y a pas de solution à ce blocage.

Votations populaires

En 2018, je me suis fortement engagé contre deux initiatives populistes et toxiques. La première demandait l’abolition de la redevance radio-télé (« No Billag ») et la deuxième demandait à ce que la Suisse ne respecte plus le droit international (initiative « juges étrangers »). Tandis que cette dernière émanait de l’UDC, la première pouvait compter sur son soutien.

Dans les deux cas, j’ai choisi comme outil de campagne la publication d’argumentaires tranchants au début de campagne. Ces argumentaires ont été consultés par 11 000 personnes pour l’initiative dite « pour l’autodétermination – contre les juges étrangers » et par 70 000 personnes pour l’initiative «No Billag ».

Engagement au sein de la présidence du PS suisse

C’est un aspect méconnu de la fonction de président du Groupe parlementaire : je suis membre de droit de la présidence du PS suisse. En 2018, j’ai consacré beaucoup d’énergie à préparer les élections de 2019, notamment pour élaborer la stratégie et le message. La présidence du PS suisse constitue une équipe soudée et c’est un plaisir d’œuvrer en son sein.

La présidence du PS suisse m’a demandé de rédiger un rapport sur la mobilité électrique que j’ai livré en mai et qui a servi de base à l’Assemblée des délégué-e-s de juin 2018, conjointement avec le rapport de Beat Jans sur la décarbonisation de la place financière.

En général, j’essaie d’éviter de signer moi-même des interventions parlementaires et je préfère distribuer le travail au sein du groupe. Mais je me suis permis, comme rédacteur du rapport, de faire une entorse à cette règle en déposant la motion suivante : «Lutte contre le réchauffement climatique. Stratégie, agenda et mesures pour la décarbonisation de la mobilité routière » (18.4020).

 

Enfin, j’ai poursuivi mon engagement comme président de Swissolar et au comité de Swisscleantech.